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De la douleur du manque à la gratitude de ce qui a été

De la douleur du manque à la gratitude de ce qui a été

Il y a quelques semaines mon système nerveux à sorti le drapeau blanc. Il n’en pouvait juste plus de toute cette charge supplémentaire à tenir à bout de bras. Les délais et les incertitudes administratives ont été son coup de grâce. Il était rendu à bout de souffle. Je suis allée chercher de l’aide et du soutien et j’ai compris que je touchais également à une autre couche de deuil qui était principalement habitée par de nombreux regrets et peines en pensant à ces années de complicité, à nos difficultés et à ce qui aurait pu être.
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De l’autre côté du voile

De l’autre côté du voile

Le 13 août dernier, mon Nomade, mon Trucker, mon Géant au grand cœur, l’homme le plus précieux de ma vie, est mort. Ce matin-là, étant donné qu’il ne répondait ni aux textos ni aux appels depuis plusieurs heures, je me suis rendue chez-lui m’assurer que tout était ok. J’avais un étrange feeling et je sentais qu’une partie de moi savait ce qui m’y attendait même si j’espérais me tromper. Sans le savoir j’avais été préparée par l’invisible pour la découverte que j’allais faire.
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Un solstice, un portail, un passage, une mort et un hommage


décembre 2015

Mon gros bébé, ça fait deux jours que tu me pousses dans le dos pour que j’écrive enfin ce billet de blogue. Je ne sais pas trop comment le commencer ni la forme qu’il prendra, mais je m’y mets, simplement parce que je sens que c’est le temps et que c’est important.

Ce matin une guidance m’a doucement amenée à fouiller dans nos photos pour sélectionner celles qui feront partie de ce billet. J’ai trouvé l’idée bonne et m’y suis mise sans y réfléchir davantage, sentant que les mots me viendraient en temps et lieu.

Ce n’est qu’en reprenant les photos sélectionnées pour les traiter une à la fois que les émotions sont réapparues en force. À cette photo j’ai craquée…


mars 2010 – 11 mois

J’ai l’impression que je retardais l’écriture de ce billet parce que je ne savais pas trop s’il fallait que j’en fasse un récit de ton passage, un hommage au 9 ans que tu as passé à nos côtés ou mettre plutôt l’accent sur les leçons de vie et de cheminement derrière tout ce qui a entouré tes dernières semaines.  Cet après-midi je sens bien que tous ces questionnements sont une tentative à rester au-dessus des émotions en lien avec ton absence. Pourquoi? Parce que je suis surprise de leur ampleur compte tenu que je savais depuis longtemps que cette fin approchait. J’ai l’impression que dans les deux derniers mois, j’ai tellement rationalisé ton éventuel départ. Pourtant, ma peine était tellement vive dans les jours qui ont entouré ta mort. Une intensité plus grande que nature qui me visite encore par vagues, sans crier gare.

Tu as été le plus fort de nous deux dans ce grand passage.

Il faut dire aussi que tu étais celui qui était prisonnier de ce corps malade qui te restreignait de plus en plus à chaque jour.

À la fin mai j’ai su que tu venais d’amorcer ta descente. Je sentais à ce moment que tu étais en harmonie avec ton état et que le temps des décisions n’était pas encore venu. Que tout s’éclaircirait en temps et lieu.

Mais plus les semaines passaient, plus tu étais restreint dans tes déplacements. Fini les balades en auto pour aller explorer d’autres forêts. Fini les trop longues marches. Tu passais de plus en plus de temps couché et avais de moins en moins d’endurance quand tu t’excitais. Quelques minutes et tu retournais te coucher. Tout ça en plus de tes muqueuses et de ta peau qui avaient de plus en plus de problèmes.

J’ai demandé des signes.

Et j’en ai eu plusieurs.

Parmi les plus clairs et les plus frappants, il y a eu ce moment où, me sentant impuissante face à tout l’inconfort que tu semblais vivre, je me suis agenouillée près de toi et t’ai expliqué que je voyais 3 options pour que tu sois mieux. Une de ces possibilités étaient l’euthanasie. C’est seulement lorsque j’ai mentionné cette option que tu m’as spontanément donné la patte. Et c’est là que j’ai su, jusqu’au plus profond de mon être, que la fin de ton corps physique approchait à grand pas. La mort rodait.

D’autres signes se sont ajoutés au fil des jours jusqu’à ce que jeudi soir le 20 septembre, je comprenne hors de tout doute que le temps était venu, que tu n’en pouvais plus. Que tu étais prêt à te libérer de ton corps physique si mal en point. En regardant le calendrier ce soir là, j’ai réalisé que le lendemain j’avais une rencontre de travail avec une grande alliée. Je sentais que tu voulais ou devais partir rapidement, et qu’il y avait un lien entre ton départ imminent, la visite de cette alliée et l’Équinoxe qui approchait.

Le lendemain, j’ai donc profité du support que m’apportait la présence de cette belle amie pour téléphoner au vétérinaire. Il ne leur restait que deux places de disponibles. Une le jour même en fin d’après-midi (je n’étais pas prête à ce que se soit si rapide) et une le lendemain à 13:30.

Le lendemain.

Samedi le 22 septembre 2018.

Jour de l’Équinoxe…

Quand je t’ai laissé sortir ce matin là, tu as fait quelque chose que je ne t’avais jamais vu faire auparavant. Après t’être soulagé, tu as marché tranquillement, tout le long de la cour, comme si tu faisais une dernière fois le tour de ton territoire. Puis tu t’es arrêté presqu’au centre de la cour, tu as levé légèrement le nez vers le ciel et tu es resté longtemps comme ça, comme si tu t’imprégnais une dernière fois de cet endroit.

Une fois arrivé au vétérinaire, tu as semblé avoir un regain d’énergie. Tu es entré sans hésiter dans la clinique, toi qui s’y rebutais tant habituellement. Puis tu es monté sur la balance. Ton poids ce jour là? 88.8 (livres). Quand j’ai vu ce chiffre, la première chose qui m’est venu à l’esprit a été « Ça fait beaucoup de 8! » et j’ai senti que c’était aussi un message et qu’on était soutenu.

Une employée nous a reconduits jusqu’à leur petit « salon de fin de vie » et a installé une grosse couverture par terre où tu t’es couché. Je me suis assise à tes côtés, collée contre toi, ta grosse tête face à moi. On a eu un long moment ensemble avant que la technicienne vienne nous voir. Un long moment pour te flatter, te dire à quel point tu étais un chien extraordinaire, combien je t’aimais, ce qu’on faisait là, etc. Tout au long de la procédure tu as mis et remis ta patte sur moi. Puis, quand les relaxants ont commencé à faire effet, tu as simplement accoté ta grosse tête sur mes cuisses. C’est dans cette position que tu as reçu la dernière injection et que tu as rendu ton dernier souffle. Ça s’est fait tout en douceur, avec une vétérinaire et une technicienne calmes et discrètes, et avec plein de temps pour rester avec toi avant et après la procédure.

J’ai suivi ma guidance tout au long de ce processus, et t’ai accompagné jusqu’au bout, jusqu’aux portes de la mort, de ta libération. Même si je savais que c’était la meilleure chose pour toi, que c’était ce que tu désirais et que le timing était le bon, ton départ m’a déchirée d’une façon brutale. Je suis repartie de là sonnée.

Quand j’ai quitté la clinique, en ouvrant la porte, j’ai senti que ce geste, ce seuil de porte, symbolisait un grand passage.

Je me suis permise de toucher au vide, à la profonde tristesse tout en sentant que ce départ était aussi une porte importante pour moi. Un passage, une renaissance.

Je n’ai pas encore tout à fait compris en quoi consiste ce passage , mais je sens comment cette déchirure est bien plus qu’une douleur et un deuil. Mon gros Bouddha, tu m’as offert une grande occasion de guérison à travers tous mes pleurs.

Une occasion entre autre d’accepter cette vulnérabilité dans laquelle j’avais les pieds et de permettre à la petite fille en moi de pleurer tout ce qu’elle avait à pleurer.

2018 aura été une année intense pour mon lien avec mes animaux. Tes « soeurs » minettes t’ont toutes les deux précédé dans cette traversée vers les Grandes Plaines de Lumière. Lili en janvier et Lulu, un mois jour pour jour avant toi (les récits de leurs départs sont ici et ici). Je sais que vos départs ont leur raison d’être. Ce n’est pas un hasard, j’en suis certaine.

J’ai choisi de permettre à la Lumière de s’infiltrer dans ce passage et dans mes questionnements. Je continue d’avancer ma vie, me permettant de m’arrêter quand une vague monte, et continuant d’avancer lorsqu’elle se calme.


juin 2013 – 4 ans

Je sens la petite Mariepierre en moi dévastée par ce départ.

Peut-être a-t-elle peur que je redevienne sérieuse? Ne crains rien ma chouette, avec la Coyote à nos côtés, être sérieuse n’est plus une option. Enlignée et concentrée oui, mais avec équilibre et puissance. La Vie veille.


avril 2012 – 3 ans

Mon gros Bouddha, je t’aime. Merci d’avoir rejoint notre tribu en juin 2009.


juin 2009 – 2 mois

Tu n’as pas été un chien comme les autres. De un, j’ai toujours eu l’impression, surtout dans les 5 premières années de ta vie, que tu étais persuadé que tu étais un petit garçon-humain et non un chien.


Tu ADORAIS te faire brosser les dents – décembre 2011 – 1 an

Tu demandais à te faire déguiser quand les enfants sortaient les coffres de déguisements. Tu insistais également pour te faire orner toi aussi lorsqu’on sortait la peinture à maquillage.


Ça nous avait pris quelques minutes à réaliser que tu nous demandais d’être toi aussi maquillé! ♥

Tu as été le seul chien que j’ai connu à qui on a dû apprendre (et soutenir émotionnellement dans ton apprentissage) à ronger un os de chez le boucher. Tu étais un chien pas trop alpha de nature mais qui donnait TOUT ce qu’il avait quand venait le temps de protéger sa famille.

Le frère de mes enfants, mon deuxième fils.

Le copain yang de mon plus jeune.

Ta joie de vivre! Tes yeux pétillants, ton coeur grand comme le monde, ton énergie souriante et enthousiaste, et ce jusqu’à la fin.


Juillet 2015 – 6 ans – Un allié dans un déménagement initiatique

À tes yeux autant qu’aux nôtres, tu faisais entièrement partie de notre tribu de fous.

Tu es arrivé dans ma vie alors que mon quotidien était rempli d’enfants 24h/24 puisque nous faisions l’école à la maison. Une tribu bien vivante et débordante de créativité et de vie, quatre enfants de 4 à 18 ans, une maman (moi!), une vieille chienne malade et notre vieille minette qui avait alors 11 ans.


Août 2009 – 4 mois


Août 2013 – 4 ans


Août 2015 – 6 ans

Tu étais un chien au coeur souriant qui remplissait un grand espace dans notre famille et notre maison. Ton départ a laissé un grand vide.

Je me console en me disant que maintenant tu peux galoper joyeusement dans Les Grandes Plaines de Lumière, libre de tes douleurs et restrictions.


Nos escapades me manqueront! ♥


Février 2015 – presque 6 ans


Avril 2018 – 9 ans
Avec ton « neveu » venu passer 5 mois chez-nous,
t’apportant une grosse dose de bonheur et de soutien! ♥


février 2010 – 10 mois

22 septembre 2018.

Cette date restera gravée dans ma mémoire.

Ce jour là, je suis revenue à la maison sans toi. Rapportant une laisse et un collier qui ne serviront plus.

Ce jour là, tu es parti et on m’a redonné la responsabilité de ma joie et de mon expansion.
On m’a aussi offert de traverser un passage, un portail.

J’ai saisi cette offre.

Que me réserve la suite? Je ne saurais le dire.

Mais je sais qu’un jour je comprendrai pourquoi en 2018 tous mes animaux sont partis, chacun d’une façon bien différente.

Merci mon gros chien pour ces neuf années bien remplies!
Tu auras toujours une gigantesque place dans mon coeur! ♥

Mariepierre

 

 

Le cycle de la Vie et de la Mort

Il y a presqu’une semaine, notre deuxième minette, notre Lulu dodue, a disparu. Je dis deuxième parce que notre autre minette (la mini Lili) est décédée à la fin janvier après s’être fait frapper par une voiture devant chez moi. (Vous pouvez lire ce récit en suivant ce lien.)

Depuis que nous sommes déménagés ici, avec la forêt qui n’est pas très loin et le caractère indépendant et « thug » de Lulu, je m’étais préparée à la possibilité que ma grosse minette rescapée de la rue ne revienne pas d’une de ses escapades nocturnes estivales, la région étant reconnue pour sa population de pékans, prédateurs des chats domestiques. Mais entre se préparer et le vivre…. ben c’est deux.

Le plus difficile a été d’espérer qu’elle ne souffrait pas et de ne pas savoir.

Ne pas savoir ce qui lui était arrivé puisqu’elle est simplement partie comme à l’habitude mais n’est jamais revenue.

Le premier 24 heures a été brutal et le vide grand.

Oui elle passait beaucoup de temps dehors l’été (la majorité de ses journées et de ses nuits) mais rentrait plusieurs fois par jour pour manger et pour se faire flatter quelques instants.

Ironiquement, durant le 48 heures qui a précédé son départ la température a beaucoup refroidi la nuit et elle ne s’est pas fait prier pour dormir au chaud.

Jeudi dernier, après presque 24 heures dans la maison, avec la température qui se réchauffait, elle est sortie.

Et n’est plus revenue.

Dès jeudi soir j’ai eu un mauvais feeling. Ce n’était pas normal qu’elle ne soit pas venue manger. C’était une minette bien gourmande. Je gardais espoir en me disant qu’une absence de 24 heures n’était pas automatiquement signe de fatalité. Vendredi j’ai arpenter les rues du voisinage au cas où elle se soit fait frapper, mais n’ai rien aperçu d’inhabituel.

Son bol est resté intact et à sa place jusqu’à dimanche. L’enlever voulait dire que j’avais perdu espoir et je n’étais pas encore rendue là…

Samedi pm j’ai été prendre une autre marche en m’assurant de bien me centrer et d’avoir les antennes et l’intuition à on et le volume au maximum. Ne sachant trop où regarder même si son territoire au niveau du quartier était assez restreint, mes pas m’ont amenée une fois de plus devant la forêt avoisinante. Mon regard allait de lui-même se perdre loin derrière les premiers arbres. Soudain j’ai su hors de tout doute. Lulu était dans cette forêt. Et je sentais profondément qu’elle n’était plus dans son corps physique et que je n’avais PAS à aller à sa recherche.

Je suis revenue chez-moi la tête perplexe devant le calme de mon cœur.

Une partie de moi disait let it go, que le cycle de la vie est parfait et sage alors qu’une autre partie aurait tellement aimé SAVOIR ce qui était arrivé, et surtout avoir une chance de boucler concrètement, d’honorer son corps si elle était morte. En écrivant ces mots à une amie au retour de ma marche j’ai entendu clairement « et si tout était parfait et qu’elle a mis son corps exactement à l’endroit où elle le voulait? »….

Samedi soir je me suis couchée tard, prenant le temps de faire mes demandes à l’Univers et à la pleine lune. Mes demandes à Lulu aussi.

Lui demander de venir me voir dans mes rêves ou du moins de m’envoyer un message clair de ce qui lui était arrivé et de ce qu’elle voulait que je fasse ou que je comprenne.

Le lendemain matin je me suis réveillée tôt et j’ai immédiatement senti à quel point j’étais totalement calme. Même ma tête. Pourtant je ne me souvenais pas d’avoir eu la visite de ma minette en rêve… Mais je sentais une grande paix émanant d’elle.

J’ai pris le temps de méditer et de faire le silence en moi et c’est dans cet espace que j’ai su, hors de tout doute, ce qui s’était passé.

Lulu n’était plus dans son corps et elle me disait qu’effectivement c’était dans cette forêt que son corps avait disparu, que oui elle avait été mangée par un pékan, qu’elle était totalement en paix avec ça, que ça avait été son choix de mode de départ, que ça ne servait à rien que j’aille arpenter la forêt parce que je ne la retrouverais pas physiquement, qu’elle avait adoré être notre minette mais que son temps sur terre était complété. Elle ajoutait également deux autres renseignements que je garde précieusement comme message personnel entre elle et moi mais qui m’ont surpris tout en me faisant un grand bien.

J’ai remercié l’Univers, ma belle Lulu, la perfection de cette ronde de la vie et de la mort, le libre arbitre que les chats à qui ont donne la liberté de sortir dehors ont, l’alliance avec le monde animal et les peuples invisibles. J’ai aussi remercié ce peuple des arbres que j’aime tant et qui a été le témoin silencieux de ce départ.

La boucle était bouclée, Lulu était maintenant traversée et elle pouvait chasser les écureuils des grandes plaines de lumières avec sa petite soeur Lili qui l’attendait depuis janvier dernier. Je sens qu’elle est bien et que tout ça est selon un plan beaucoup plus grand que moi et ça m’apaise.

Nous avons eu la chance de passer plusieurs années avec cette minette bien particulière au passé inconnu et à la personnalité calme et enracinée. Elle a choisi son départ et le moins que nous puissions faire est de respecter et d’honorer son choix. C’est donc dimanche que j’ai ramassé son bol de nourriture et son bol d’eau. C’était le geste de la fin.

Depuis, elle danse librement.

La maison n’est plus la même.

Il ne reste que mon gros chien, sa fidélité et ses problèmes de santé.
Dire que ça fait trois ans que je pense que c’est lui qui partirait le premier.

La Vie en sait beaucoup plus long que nous…
Mieux vaut lui faire confiance!

Merci ma belle Lulu d’avoir fait partie de notre tribu.
Tu auras toujours une place bien spéciale dans nos coeurs!♥

Mariepierre

 

 

Ce moment où mon coeur s’est émietté sur le bord du trottoir

À chaque matin où j’ouvre les yeux, une journée de plus commence, une journée de plus où je suis en vie. Une journée de plus où la danse de la vie et de la mort aura lieu dans la vie de chacune et chacun d’entre-nous. Je n’ai pas de maladie grave ni de verdict sombre qui me plane au-dessus de la tête si ce n’est qu’une garantie, celle qu’un jour mon corps arrivera à son dernier souffle. Depuis plusieurs années je me sens en paix avec ce fait, avec la certitude qu’un jour ma mort physique viendra et que je ne sais pas du tout quand je laisserai mon enveloppe physique retourner à la terre. La grande faucheuse me fascine et lorsque la Vie m’amène à soutenir un être dans ce moment de passage, j’y suis totalement, avec présence, compassion et respect.

Bien que formée en accompagnement de fin de vie humaine, c’est souvent auprès des animaux vivant leurs derniers moments que la Vie me place. Si vous en avez envie, vous pouvez d’ailleurs lire deux récits d’accompagnements ici et ici.

Toujours est-il que le 25 janvier, la Vie a urgemment réquisitionnée ma présence auprès de ma petite dernière alliée poilue, la seule de ma tribu dont je ne m’étais jamais imaginée la disparition.


crédit photo Zoé Parenteau

En 2016 je croyais ma famille complète, avec deux grandes filles volant de leurs propres ailes, deux ados à la maison, un gros Labernois (Bouddha) alors âgé de 7 ans, aux hanches et genoux capricieux, ainsi que Lulu, une grosse minette tigrée, âgée de 3 ans, gourmande et thugh, rescapée de la rue quelques années plus tôt. Mais la Vie avait une surprise pour moi. Contre toutes attentes, en juin 2016 ma tribu familiale s’agrandissait en accueillant Lili (oui oui, c’était vraiment son nom), une petite chatte tigrée de trois ans dont la propriétaire déménageait aux États-Unis. Cette petite minette élancée et timide au poil doux comme du velour et aux grands yeux verts m’a tout de suite séduite et en quelques mois s’était tissé entre elle et moi un lien très très particulier. Elle est entre autre devenue mon chat artiste, s’asseyant sur mes toiles, jouant avec mes fusains ou léchant le lait que j’appliquais en guise de glaçure sur mes sculptures de plâtre.

Même si elle avait le même âge que notre grosse Lulu que pas grand chose impressionnait, Lili a toujours été pour moi le « bébé » de la famille, ma plus petite, la petite soeur des autres.

C’est encore très irréel de parler d’elle au passé… Depuis quelques années je me suis préparée au départ éventuel de mon gros chien étant donné ses problèmes de santé. Je me suis aussi préparée à la possibilité que ma Lulu ne revienne pas d’une de ses escapades nocturnes estivales, la région étant reconnu pour sa population de pékans, prédateurs des chats domestiques. Mais Lili???

Bien sûr en la laissant aller dehors je savais que j’augmentais le facteur risque mais comment aurais-je pu lui imposer de demeurer une petite chatte uniquement de maison alors qu’elle voyait tout le reste de la maisonnée profiter de ce qui se trouvait de l’autre côté de la porte d’entrée?  Après 10 mois à l’intérieur à se familiariser avec la maison et tout le reste de la tribu, surtout avec notre chien, je lui ai donné accès à dehors, non pas sans inquiétudes maternelles et avec plusieurs précautions! Je me souviens de cette première fois où elle est sortie, sa première heure dehors où j’ai dû aller cent fois à la fenêtre en me rongeant les sangs et espérant l’apercevoir, demandant à l’Univers de veiller sur elle et de la faire rentrer rapidement. Au bout de cette heure, elle est rentrée en galopant dans la maison et est directement venue me voir pour me « raconter » tout ce qu’elle avait vu, se frottant sur mes jambes et sur ma table en faisant une multitude de miaulements que je n’avais jamais entendus auparavant. J’avais vraiment le sentiment qu’elle était comme une petite fille émerveillée et excitée de fouiner dans son nouvel environnement et qu’elle me partageait ses découvertes.

À partir de ce jour, aller dehors est devenu essentiel pour elle. Au fil des semaines elle s’est transformée et est passée de petite fille de maison à chasseuse aguerrie et experte de la grimpe, dépassant de loin notre Lulu qui avait pourtant beaucoup plus d’ancienneté qu’elle dans ces domaines! C’est aussi à partir de ce moment qu’elle et sa « soeur » se sont mis à non plus uniquement se tolérer mais à réellement jouer ensemble. Lili était ici chez-elle et régnait sur son territoire en chasseresse redoutable.  Elle était une naturelle et la nature et l’air frais sont devenus ses terrains de jeu. Elle rentrait à tous les soirs et était prête à recommencer à tous les matins. J’ai su que j’avais fait le bon choix en lui permettant de sortir dehors.

Avec l’arrivée de l’automne et des temps froids je pensais que la petite Lili élancée préférerait, tout comme la grosse Lulu qui en a vu d’autre, passer l’hiver au chaud en mode pro-confort, réservant ses sorties extérieures pour les journées moins froides. Eh bien non. Bien sûr elle passait beaucoup moins de temps dehors que durant l’été et allait beaucoup moins loin, mais elle ne pouvait s’en passer.  Même à des températures de -30 Lili demandait à sortir, même si ce n’était que pour quelques minutes assise sur le bord de la galerie.

Jeudi dernier, le 25 janvier, n’y fit pas exception. Le soleil brillait, les oiseaux chantaient et, même si le maximum atteint n’était que -12, Lili jubilait! Elle a passé l’avant-midi à sortir et rentrer, venant se frotter sur mes jambes, se réchauffer un brin et retournant en trottinant s’amuser sur son territoire. Avec le recul, j’ai l’impression qu’elle a fait ses in and out  beaucoup plus souvent qu’à l’habitude et que ses moments à l’intérieur étaient encore plus « avec nous » qu’à l’habitude. Peut-être savait-elle ce qui l’attendait… 🙁

Vers midi, aux prises avec la grippe depuis plusieurs jours, je suis montée faire une petite sieste. Une dizaine de minutes plus tard les chiens (mon gros Bouddha et Spike, le petit chihuahua de ma fille) se sont mis à japper. Je suis descendue voir ce qui se passait et j’ai remarqué cette voiture stationnée devant chez-moi. Les chiens obéissaient à mon ordre de ne plus japper mais étaient aux aguets et nerveux. J’ai vu la dame de l’auto courir chez ma voisine d’en face. Elle avait l’air très agitée et je me demandais bien ce qui se passait et qui elle était. C’est lorsqu’elle est revenue à sa voiture et s’est dirigée du côté passager que le questionnement qui m’habitait m’a poussé à m’approcher de la fenêtre.

Et c’est là que j’ai vu.

J’ai vu un chat tigré couché sur le côté dans la rue, derrière la voiture. J’ai immédiatement su que c’était une de mes minettes.  J’ai immédiatement compris ce qui se passait.

Je suis sortie en courant et dès que j’ai été assez proche et que j’ai vu les rayures plus rousses et le regard vert, mon coeur s’est émietté. C’était Lili, mon bébé, ma petite poulette, ma petite minette qui avait une place si spéciale dans mon coeur.

Elle était couchée sur le flan, les yeux en panique, la bouche ouverte, la langue sortie et le souffle étrange. Immédiatement j’ai su qu’elle ne s’en sortirait pas et que la Mort rodait. J’ai retiré le grand foulard que j’avais au cou et l’ai abrillée doucement en mettant ma main sur elle, en lui parlant et en lui disant que je restais avec elle, qu’elle n’était pas seule, que j’étais là. Elle s’est calmée un tout petit peu.

Je l’ai délicatement pris dans mes bras, ai échangé quelques mots avec la conductrice qui pleurait autant que moi puis suis rentrée avec mon petit paquet d’amour abîmé dans les bras. Je l’ai déposé sur leur grosse serviette moelleuse sur la table et me suis assise près de sa tête et lui ai parlé tout doucement, sans arrêt, en gardant une main sur elle, la rassurant, lui expliquant ce qui se passait, la remerciant d’avoir été une compagne si précieuse, lui disant avec ma voix qui brisait, qu’elle était libre de partir, que je resterais à ses côtés jusqu’à la fin, que j’étais là pour elle. Tout était tellement silencieux dans la maison. Les deux chiens ne faisaient plus aucun bruits et il m’a semblé que la Vie elle même retenait son souffle.

Même si ses blessures externes étaient très minimes, il m’était évident qu’à l’interne c’était beaucoup plus grave, que ça n’allait pas du tout. J’aurais aimé qu’elle quitte rapidement son corps dans le confort et la sécurité de sa maison. Ma grande était dans sa douche et j’ai décidé que le temps qu’elle sorte, je n’essayais pas de prendre de décision. Que pour les prochaines minutes mon seul rôle était d’être présente pour ma petite poulette.


crédit photo Andrea Dube

Ma grande Andrea est descendue et je l’ai mis au courant. Elle a passé un rapide coup de fil à sa soeur qui est technicienne animale et qui nous a envoyé, sans plus tarder, à la clinique la plus proche pour ne pas laisser Lili souffrir pour rien. Ça me brisait le coeur de devoir la déplacer et surtout de l’apporter en auto rencontrer des gens qu’elle ne connaissait pas, elle qui se poussait le plus loin et le plus rapidement possible des étrangers. Mais je réalisais également que ce qu’elle vivait actuellement comme douleur et comme incapacité de réellement bouger devait être pour elle un facteur de stress beaucoup plus élevé que de rencontrer un nouveau visage.

Nous sommes donc partis pour la clinique vétérinaire. Andrea au volant, moi tenant Lili bien emmitouflée contre mon coeur et Spike, le chihuahua d’Andrea, qui a été comme le gardien de la vibe tout au long de cette éprouvante après-midi.

À la clinique on nous a tout de suite reconduit dans leur petit salon de fin de vie, le même où ma vieille compagne avait rendu son dernier souffle il y a cinq ans. Le temps que j’allonge Lili avec sa doudou sur la petite table moelleuse, la plus gentille, douce et compatissante vétérinaire est rentrée dans la pièce avec son assistante. D’un coup d’oeil rapide elle a confirmé que c’était majeur et qu’on allait même sauter l’étape du calmant pour la libérer au plus vite.

J’étais installé à la tête de Lili et elles ont préparé sa petite cuisse arrière pour l’injection. J’ai murmuré dans ses petites oreilles poilues combien je l’aimais, que dans quelques secondes elle ne souffrirait plus et que j’étais là, tout près d’elle. Elle a bougé un tout petit peu sa patte droite pour la déposer sur le bout de ma main et, avant même que toute l’injection ait été administré, elle est morte.

Nous avons rapporté son corps à la maison et je lui ai fait un petit cercueil en transformant rapidement une boite de chaussures puis l’ai installée avec une doudou étoilée et son jouet favori. Je devais me garder occupé avec ces quelques gestes tendres et concrets parce qu’une partie de moi avait juste le goût de se coucher en petite boule avec son corps contre moi, aussi longtemps que possible. Mais une grande vague calme et enveloppante me rappelait que Lili devait être installée dans sa boîte durant qu’il était encore facile de l’installer adéquatement et de façon à ce qu’elle ait l’air confortable.

Restait à attendre le retour de mon fils pour lui annoncer la triste nouvelle. Je vous assure qu’il n’y a pas de bonnes façons d’annoncer ça. Après l’avoir mis au courant, j’ai ouvert la boîte pour lui montrer Lili et, entre deux sanglots, il m’a dit « on dirait qu’elle dort ». Ça m’a confirmé que je l’avais installée exactement comme il le fallait.

Plus tard dans la soirée, alors qu’il ne restait plus que mon jeune guerrier et moi, j’ai décidé d’écouter le besoin qui me montait et de faire une veillée du corps, avec rituel, décoration de son cercueil, musique de circonstance et beaucoup d’écriture (et de larmes) dans mon journal.

Ces quelques heures m’ont beaucoup aidée à me faire à l’idée que je ne pourrais plus jamais la flatter. Une extension temporelle avant de descendre son cercueil bien enveloppé au congélateur de la cave, en attendant que la terre dégèle et que Lili puisse être enterrée dans la forêt, près de notre Fany qui l’a précédée il y a cinq ans.

Je ne comprends pas encore pourquoi j’ai ressenti le besoin de vous raconter tout ceci avec autant de détails. Chose certaine, ça m’y replonge et m’aide à l’assimiler, mais je sens qu’il y a plus que ça. De un, si vous connaissez la conductrice qui a frappé Lili bien malgré elle, faites lui un câlin de ma part et remerciez-là pour son humanitude. Je suis profondément reconnaissante qu’elle ait pris le temps de s’arrêter et de chercher frénétiquement à quelle maison appartenait ce chat. Car si elle avait continué son chemin comme trop de gens font, je n’aurais sûrement pas vu aussi rapidement Lili gisant dans la rue et n’aurais peut-être pas pu être à ses côtés pour la rassurer et l’accompagner. Son départ  laisse un trou béant mais la synchronicité dans tout ça me réchauffe le coeur.

Et parlant de synchronicité, le soir même j’ai sorti mes journaux intimes de l’été 2016 (été où Lili a rejoint notre famille) et j’ai été estomaquée de réaliser les questionnements majeurs qui m’habitaient au moment où elle est entrée dans mon coeur et le rôle qu’elle a joué comme facilitatrice de mes décisions. Suivant la petite voix qui me soufflait à l’oreille d’aller voir ce qui s’était passée l’an dernier au 25 janvier, j’ai été encore plus stupéfaite de réaliser que la date de son départ coïncidait jour pour jour à une autre décision majeure et que ce « un an de sevrage » avait été atteint le jour même du décès de Lili. J’ai alors senti et compris. Senti à quel point notre lien avait été sacré et important et combien son rôle dans ma guérison de femme avait été mené de main (ou de patte!) de maître.

Les morceaux de mon coeur se recollent doucement. Chaque soir je regarde le ciel et me dit qu’une étoile de plus brille là-haut et qu’elle continue d’être avec moi dans l’invisible.

Certain moments sont plus douloureux. Comme le lendemain matin où lorsque mon cadran a sonné, il n’y a pas eu de petite Lili qui est venue me tapotée le visage de sa patte pour que je me lève… 🙁

On a beau savoir que tout arrive pour une raison et que nous sommes beaucoup plus que nos enveloppes physiques, un deuil reste un deuil et prend le temps qu’il prend.

Un temps que je m’offre.

À ma couleur.

Repose en paix ma minette chérie! Merci pour ce merveilleux 19 mois ensemble.
Je ne t’oublierai jamais!

Et ne sème pas trop la terreur chez les tamias rayés des grandes plaines de lumière! 😉

Mariepierre